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Au bout d'une corde : Un fils nous livre un pognant témoignage sur le suicide de son père
Au bout d'une corde : Un fils nous livre un pognant témoignage sur le suicide de son père




Au bout d'une corde : Un fils nous livre un pognant témoignage sur le suicide de son père
"''En mémoire de mon père agissons collectivement pour améliorer notre société. SVP, partagez.''"

C’est sur sa page Facebook que Hugo M. Alarie a décidé de nous livrer son message. Son père décédé depuis 15 ans avait donné quelques signes de dépression, mais pas au point que l’on puisse pense qu’il allait commettre un tel geste.



Voici ce qu’il écrivit sur sa page Facebook :



Au bout d’une corde

C’était un lundi, le 27 janvier 2003, j’avais 17 ans. La journée était glaciale. Ce midi-là, j’étais seul avec mon père dans la cuisine. Mon père était à la maison depuis quelques mois, sur le chômage puis sur le B.S.. C’était parce qu’il était en dépression, ç’avait commencé un peu après la mort de son père, il s’était suicidé, 8 mois plus tôt, le 27 mars. J’avais su qu’un ami lui avait récemment offert un emploi. Mon père disait qu’il était tanné de rester à la maison, il voulait faire quelque chose de ses journées, il voulait se rendre utile.

Je pensais qu’il sauterait sur l’occasion, un nouveau travail, un nouveau défi, un moyen de se rendre utile, exactement ce qu’il recherchait. Mais non…il avait refusé. Je n’ai pas compris pourquoi, j’étais fâché, je lui ai fait la morale, comme seul un ado sait le faire, je suis parti en claquant la porte, je ne lui ai pas dit Bye. Quand je suis revenu après l’école, ma tante, ou mon oncle, je ne suis plus certain, m’a accueilli. Je ne comprenais pas ce qu’ils faisaient à la maison assis autour de la table avec ma mère, l’air accablé. Ma mère m’a annoncé la nouvelle qui allait bouleverser mon existence.





Mon père s’était pendu dans le sous-sol au cours de l’après-midi, sa vie éteinte au bout d’une corde. Ce soir-là, je suis sorti pour courir dans la nuit glaciale. J’ai crié ma colère, j’ai pleuré à l’injustice de la vie : je n’avais même pas eu le temps de lui dire Bye, j’aurais plutôt voulu lui dire que quoiqu’il arrive, je serais toujours là pour lui. […]

Ça fait 15 ans que mon père s’est suicidé, le temps efface tranquillement les blessures et la vie poursuit inexorablement son cours. Mon histoire en est une parmi des milliers, chacun vivant son drame à sa façon. Aujourd’hui, le 27 janvier 2018, au Québec, trois autres hommes se suicideront et dans 15 ans, chaque proche revivra son drame, ressassera les moments perdus et se demandera pourquoi. Pourquoi souffrir au point de se tuer? Il semble qu’il n’y ait pas de réponses simples à un problème si complexe.

Comme mon père, la majorité des personnes qui se suicident sont des hommes, souffrant de dépression majeure. Certains ont vécu un suicide dans la famille, certains vivent des difficultés financières, certains vivent avec des dépendances, certains ont vécu des traumatismes importants. Les facteurs sont nombreux, mais chaque personne est unique. L’augmentation du nombre de ressources disponibles comme l’Association Québécoise de Prévention du Suicide (http://www.aqps.info/), la Semaine de prévention du suicide, les réseaux Sentinelles, les lignes d’écoute (1-866-APPELLE) ont aidé à diminuer considérablement le nombre de suicides au Québec depuis 20 ans.

Ces ressources sont extrêmement importantes pour dépister les individus à risque, comme un médecin aide à dépister les personnes à risque de mourir d’une maladie du cœur. Actuellement, notre système de santé concentre ses efforts pour traiter les individus qui souffrent déjà de dépression, et peu de ressources sont disponibles pour prévenir son apparition et promouvoir la santé générale des individus. Il est clairement établi que de saines habitudes de vie (alimentation, activité physique, sommeil, gestion du stress) permettent de diminuer le risque de souffrir de plusieurs maladies comme les maladies du cœur, le diabète de type 2, la douleur chronique, et même certaines formes de cancers. On les appelle les maladies de société.

Des recherches récentes montrent également que nos habitudes de vie peuvent influencer l’apparition de la dépression et des pensées suicidaires. Les maladies de société sont étroitement liées au niveau d’éducation de la population et à sa richesse; des niveaux plus élevés sont généralement protecteurs.

Pour éviter que notre société se retrouve au bout d’une corde, il est nécessaire d’améliorer nos succès en éducation et de promouvoir massivement la santé mentale et physique, pour ainsi diminuer l’énorme fardeau de ces maladies. Il est difficile d’identifier tous les individus à risque de suicide et de les aider convenablement, certains vont invariablement passer à travers les mailles du filet social.

Promouvoir l’éducation et la santé de chaque individu, c’est aussi réduire la tristesse, les regrets et la souffrance de ces ‘27 janvier’, qui sont malheureusement encore trop nombreux. Promouvoir l’éducation et la santé de chaque individu, maintenant, c’est investir dans les générations à venir, dans le futur du Québec.

En mémoire de mon père, de toutes les personnes décédées par suicide, de leur famille et amis, agissons collectivement pour améliorer notre société. SVP, partagez.






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